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La différence entre acteur-actrice et comédien-comédienne

La Différence entre comédien et acteur

« Tu es comédien ? Donc tu joues la comédie ? Du théâtre c’est ça ? Quelles genre de comédies ? »

« Tu es acteur ? Tu fais de la télévision ? Du cinéma ? »

Conversation avec une personne lambda

Certains diront que les comédiens font des comédies uniquement, qu’ils jouent uniquement au théâtre. Que les acteurs, quant à eux, c’est uniquement au cinéma ou à la télévision. C’est vrai qu’il est toujours délicat et difficile, même dans les écoles de théâtre, de Bordeaux à Paris en passant par la nouvelle aquitaine, de comprendre cette distinction. Utilisons nos fameuses définitions du Larousse.

acteur, actrice

1. Personne dont la profession est d’être l’interprète de personnages à la scène ou à l’écran ; comédien.

nom
(latin actor, celui qui agit)

comédien, comédienne

1. Personne dont la profession est de jouer au théâtre, au cinéma, à la télévision ou à la radio ; acteur, actrice.

nom

Donc si on en croit ces définitions, les deux sont des professions, se font au théâtre, à la télévision et au cinéma et seraient le synonyme de l’autre. Alors où est la différence ?

Selon notre dictionnaire préféré, le comédien joue et l’acteur interprète des personnages. Mais le métier de comédien n’est il pas de jouer des personnages ? Et un comédien peut jouer un drame ou une tragédie, non ?

Jean-Laurent Cochet disait en substance que l’acteur se confond au personnage et à la situation, une sorte de transformation, tandis que le comédien interprète les textes et les situations avec ses propres appuis (mimiques, intonations, gestuelle…). On voit que c’est lui qui interprète.

Acteurs, comédiens : même combat

Je vous avoue que je trouve cela inutile de distinguer les deux. Je suis et comédien et acteur. Le comédien ou la comédienne joue d’autres personnages que lui-même. L’ acteur ou l’actrice a ses propres appuis. C’est d’ailleurs la base du plaisir du jeu au théâtre. Jouer des personnages et des situations imaginaires que nous ne connaîtrons jamais. S’amuser à être quelqu’un d’autre (dans la limite psychologique bien sûr. On joue, on n’est pas. Attention aux confusions dangereuses dans ce domaine). Ou alors, si nous avons connus ces situations, s’amuser à les jouer autrement. Leur donner la possibilité d’autre chose

Lorsque nous voyons jouer Jean-Pierre Bacri (je n’ai rien contre lui, je prends simplement son exemple car il est évident), nous reconnaissons Bacri. Toujours les mêmes mimiques, tics, trucs, manières de parler… Nous venons voir et entendre Bacri… Qui s’efforçait toujours d’avoir une infinie justesse dans son travail. Son obsession était là. Y croire pour que le public y croit.

Lorsque nous voyons Al Pacino ou Robert De Niro jouer, nous les reconnaissons tout de suite aussi… Mais malgré tout, ils ont un autre personnage (d’autres expressions, appuis, points moteurs, intonations…) et joue la situation en fonction de l’intention de leur personnage, ainsi que celle du film ou de la pièce… Et cela avec une infinie justesse aussi.

Certains acteurs vont même jusqu’à la transformation physique (Christian Bale, Dustin Hoffman, Johnny Depp…) et malgré tout, on sait que c’est eux… Mais ils nous surprennent. Et je pense que tout est là.

J’ai été énormément surpris dernièrement par l’actrice Halle Berry. Actrice réputée pour être belle, attirante et dans des rôles de femmes plutôt fatales. Le film raconte la vie d’une combattante de MMA. Sport de combat très violent et très dur physiquement, car c’est le mélange de plusieurs arts martiaux. Pendant tout le film je me disais : « Je la connais cette actrice, je l’ai déjà vu… » Et au générique, quelle ne fut pas ma surprise de me rendre compte que c’était Halle Berry. Quelle performance ! Et quelle actrice ! Elle a dépassé son image médiatique au profit de sa création.

Mickaïl Tchekhov dans « Être acteur » fait se constat. Il dit en substance que la mode des acteurs, de nos jours, est d’oublier la construction du personnage et de jouer soi-même dans la situation. Une sorte d’hyper réalisme. Ce qu’il trouve déplorable et dommageable car on va vers un réalisme et un anecdotisme du récit et de l’expression et on enlève la possibilité de l’imagination, concept qui lui est si cher puisque c’est sa méthode : l’imagination créatrice. L’acteur en réduisant son travail imaginaire, réduit son expression réelle possible. Il n’est qu’une pâle copie de la réalité. Or c’est de l’ extra-ordinaire que vient chercher le spectateur.

Au XVIIème siècle, si un acteur faisait la salle après le spectacle et que les spectateurs ne le reconnaissaient pas hors scène, il était considéré comme un merveilleux comédien. Il avait eu le public. Maintenant c’est l’inverse. Je crois que nous gagnerions en qualité de jeu si, au lieu d’essayer de faire des distinctions entre comédiens et acteurs, nous cherchions juste à jouer extrêmement bien les personnages et les situations. Laissons le public, s’il le désire, être embarqué dans un tourbillon imaginaire… Grâce à notre travail d’anonyme…

C’est agréable d’être reconnu, c’est sûr. Mais attention, notre métier c’est de nous fondre dans l’humanité pour en être un miroir… Déformant certes, mais un miroir quand même. Voilà notre but, notre fonction, notre rôle.

Il faut suffisamment d’imagination pour se libérer de l’outrage.

Léo Ferré

C’est un métier qui demande, je crois, beaucoup d’abnégation, d’humilité et d’authenticité.

Nous ne sommes pas pareil sur le plateau que dans la vie… Ce n’est pas vrai… Sur le plateau nous devons être plus… Sur le plateau nous sommes en quatre dimension… La quatrième étant celle de l’imaginaire. Et tout ça ce n’est pas pour nous-même. On joue toujours, avant tout, pour un volume et pour un public…